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Warner Bros. est à vendre - et Netflix pourrait frapper fort
par Luca Fontana

Deux annonces en 48 heures ! HBO Max annonce son lancement en Europe et, peu après, Netflix veut racheter le groupe. Finalement, c’est assez logique et c’est ce qui rend l’affaire si intéressante.
Lorsque j’ai évoqué le lancement de HBO Max en Suisse, la communauté s’est rapidement exprimée. Pierruno a posé la question qui en tenaillait plus d’un :
HBO Max arrivera-t-il vraiment par chez nous si Netflix achète Warner ?
La confusion est compréhensible. Warner annonce une expansion massive en Europe avant d’être éclipsé 48 heures plus tard, d’abord par un gros titre sur le rachat par Netflix, puis par une contre-offre hostile de Paramount.
La réponse courte : HBO Max arrivera chez nous quoi qu’il advienne. La réponse longue est toutefois plus intéressante et en dit long sur le fonctionnement des fusions-acquisitions, sur ce qu’elles peuvent détruire et sur les raisons pour lesquelles Warner passe actuellement à la vitesse supérieure.
Si la transaction aboutit, que ce soit avec Netflix ou Paramount, l’acheteur deviendra le propriétaire de contenu le plus puissant du divertissement moderne. Un rachat de cette ampleur ne se signe d’une simple poignée de main, c’est un parcours administratif de plusieurs années. Même dans le scénario le plus favorable, l’accord ne sera pas finalisé avant fin 2026 ou mi-2027. Et le risque de se heurter à des obstacles liés au droit de la concurrence est réel. Cette bataille pour le rachat ne facilite pas la procédure, bien au contraire. Chaque nouvelle offre rouvre le processus et prolonge l’incertitude.
D’ici là, Warner Bros. Discovery reste donc une entreprise tout à fait normale, tenue de maintenir l’attractivité de son activité de streaming. Cela peut sembler trivial, mais c’est essentiel. Toute perte de valeur pourrait inciter un acheteur potentiel à renégocier le prix ou, dans le pire des cas, à se retirer. Warner est de toute façon sous pression : le groupe est fortement endetté, lutte depuis des années pour définir une stratégie claire et ne peut plus se permettre le moindre faux pas.
C’est aussi pour cela que Warner adopte aujourd’hui une stratégie offensive. Au lieu de réduire la voilure, l’entreprise se développe et investit. Pour se vendre au prix fort, elle ne peut pas donner l’impression d’être en difficulté, elle doit montrer tout son potentiel financier.
L’Europe est un levier de revenus important pour les services de streaming. Levier que Warner n’a guère exploité jusqu’ici... Pas seulement parce que HBO n’y est pas encore très présent, mais aussi parce que l’Europe est un grand marché du streaming premium, à la fois avec un fort pouvoir d’achat, accessible, réglementé et pas encore totalement occupé. C’est du moins ce que pensent de nombreux analystes et observateurs du marché qui évoquent (en anglais) régulièrement des modèles d’abonnement stables, un pouvoir d’achat et une disposition à payer relativement élevés .
Pour Warner, une expansion en Europe n’est pas qu’un signal envoyé à Netflix ou Paramount, mais aussi une sorte de couverture stratégique. Si aucun accord n’est conclu, Warner a besoin d’un plan B qui, dans le meilleur des cas, consistera à développer son propre service de streaming à l’échelle mondiale.
Quand on achète une entreprise, on ne peut pas se contenter d’une jolie vitrine. Par conséquent, si l’un des enchérisseurs rachète Warner (que ce soit Netflix, Paramount ou un troisième acteur), il ne récupérera pas simplement une montagne de contenus et de séries à incorporer à son application. Ce n’est pas ainsi que fonctionne un service de streaming. En réalité, la machinerie derrière tout cela est incroyablement complexe et fonctionne différemment selon le pays.
Et par rapport à l’Amérique du Nord, l’Europe regroupe un grand nombre de pays.
Warner possède déjà des contrats avec des chaînes locales, des partenariats avec des opérateurs télécoms, des tournages en cours, des budgets promis à des productions européennes, des accords avec les autorités, des structures de prix, des équipes chargées de gérer le service et une foule d’obligations juridiques. Impossible d’y mettre simplement fin ou de l’ignorer ; tout ça continuera, qu’il soit écrit Netflix ou Warner.
HBO Max n’est pas seulement « une appli ». C’est une entreprise avec des centaines d’éléments qui doivent fonctionner correctement pour permettre le rachat. Si Warner s’active maintenant en Europe, cela garantit que cette machine est déjà en marche, qu’elle fournit des données et qu’elle reste stable. C’est important pour tout acheteur potentiel : il est beaucoup plus facile d’intégrer une organisation qui fonctionne qu’un service qui n’existe que sur le papier.
HBO Max n’arrive pas ici malgré la bataille pour le rachat, mais en raison de l’incertitude engendrée par cette surenchère. Il faudra du temps avant que tout soit signé, approuvé et intégré. D’ici là, Warner doit prouver que HBO Max peut croître, fonctionner et même convaincre. Et ce, indépendamment du fait que ce soit Netflix, Paramount ou un autre acteur qui remporte le marché.
Le principe reste le même : plus HBO Max est solide, plus il est précieux. Voilà donc pourquoi le service débarquera tout à fait normalement en Suisse le 13 janvier 2026, peu importe les titres qui feront la une à ce moment.
J’écris sur la technologie comme si c’était du cinéma – et sur le cinéma comme s’il était réel. Entre bits et blockbusters, je cherche les histoires qui font vibrer, pas seulement celles qui font cliquer. Et oui – il m’arrive d’écouter les musiques de films un peu trop fort.
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